sandy stevens {100%}

Un jour du mois d’avril, le 21 peut-être, de cette année.
Il y a des jours comme ça où on se demande ce qu’on fait sur terre. C’est vrai quoi. A ce moment précis par exemple je me demandais ce que je foutais ici. Qu’avais-je fait pour mériter ça ? Rien de spécial, enfin il me semblait … mais en tout cas, j’aurais largement préféré que le père Noël m’oublie cette année là pour réparer la quelconque connerie que j’avais pu faire, plutôt que d’être là. Les pieds dans la boue. Du moins j’espérais que ce n’était que de la boue. Mes bottes –qui m’avaient coûtées la peau des fesses au passage- étaient littéralement enfoncées dans cette terre. Je n’avais qu’une envie ; partir en courant … mais j’étais bien trop coincée pour partir. Un démarrage m’aurait certainement fait perdre mes chaussures … et en chaussettes dans cette merde, non merci. Encore moins.
Mais si j’étais là, c’était pour ma mère. Elle s’était remariée. Une fois de plus. Et elle vivait ici avec son cher mari depuis six mois. Six mois durant lesquels je n’avais jamais mis un doigt de pieds ici. L’envie ne me prenait pas spécialement et puis les cours étaient souvent une bonne excuse pour ne pas venir. Mais là, j’abusais. Après tout c’était ma mère hein. Déjà que mon père n’a jamais voulu s’occuper de moi, autant essayer de me raccrocher un tout petit peu à ce qu’il me restait. Et puis, j’avais des choses à lui raconter. Oui. Entre une mère et sa fille on peut toujours parler non ? Et bien là j’avais envie. Parler de shopping, d’amour, de relation … de sexe. Mais je voulais en parler à ma mère. Pas à l’espèce de femme qui vint devant moi. Toute maigre, le visage marqué, j’ai mis du temps à la reconnaître. Oui, c’était bien ma mère … ou en tout cas son fantôme. Et ben. Comment cela était-il arrivé ?

« Je suis heureuse de te voir ma fille. »
« … Moi aussi. » enfin je crois pensais-je.
« Allez viens je vais te présenter Barnabé . »

Waouh. Il s’appelait Barnabé. Vive le prénom de looser quoi. Ses parents ne devaient sûrement pas l’aimer, et il le fait payer au monde entier. Il était moche en plus. Sérieusement, j’ai toujours accepté mes beaux-pères sans problèmes … mais là. NON. Impossible. Il puait … ou peut-être était-ce la ferme en général qui dégageait cette odeur à vous faire régurgiter votre déjeuner. Tiens parlant bouffe, ma mère devait lire dans mes pensées … enfin lire un mot sur deux.

« Tu veux boire ou manger quelque chose ? »
« Euh … » je savais pas très bien si j’en avais envie. Quelle réponse était la bonne ?
« On a de la tisane faite avec nos plantes et du tofu. »

Oh la blague. La bonne réponse était non. Mais ma grimace n’a pas convaincu ma mère qui continua d’argumenter.

« Barnabé est contre les soda et les hamburger. Ce sont des produits américains, et il est contre la toute puissance américaine. »
« Euh oui enfin tu sais que les hamburger sont allemands maman. … Enfin bon de toute façon j’ai mangé sur la route … j’aurais plutôt envie de me reposer un peu. »

Sur ce, elle m’a montré ma chambre. Précisant que le chauffage était inconnu. Je pétais de froid. J’ai même pensé à mettre mes chaussettes aux mains pour m’en servir de moufles, mais elles puaient les pieds alors j’ai préféré les laisser où elles étaient … quand même. Blottie dans mon lit … euh sur un truc qui ressemblait à de la pierre, je fermai alors les yeux, me jurant de ne pas remettre les pieds ici. Tant pis pour ma mère. Je la reverrais à son prochain mariage.